"Ce que tu fais, fais-le vite !"
Au moment où Judas a goûté le pain de Vie, il s'est pour lui seul, à cause de sa faute cachée, de ses rêveries malsaines de pouvoir et d'argent, transformé en pain de mort. Livrer Jésus, tous auraient pu le faire, et d'ailleurs, ils se sont regardés les uns les autres en se disant "Serait-ce moi ? " Même Pierre qui assure pouvoir mourir avec son maître, était capable de livrer Jésus. A ce moment-là, tout était possible. Il faut se souvenir que le Christ avait laissé aux disciples de nombreux signes (dont la Transfiguration, et aussi la résurrection de Lazare), mais il est dit, dans plusieurs passages, qu'ils ne comprenaient pas. Marthe, la soeur de Lazare, énonce très simplement l'idée que tous se font au sujet de la résurrection. Jésus lui dit : "Ton frère ressuscitera." Et elle répond: "Je sais qu'il ressuscitera à la résurrection, au dernier jour." Et si l'on disposait d'une bande sonore de sa déclaration, nul doute qu'on percevrait son soupir: le dernier jour semble infiniment lointain !
C'est dire la confusion et le trouble dans lesquels ils ont tous plongé, lorsque Jésus a dit : "L'un de vous va me livrer". Jésus ne commandite pas le crime, et il n'y a pas chez Judas une sorte de prédestination à accomplir l'Histoire (c'est fou ce qu'on peut lire !), mais il lui révèle simplement le poids qui a fondu dans son coeur, cette espèce de "détermination-sans-amour" qui est l'intention de pécher... Chacun d'entre nous, hélas, sait ce qu'il en est...
En réalité, nous aussi nous avons livré Jésus et nous le faisons encore lorsque nous nous détournons du souffle qui anime notre coeur. Il existe pourtant un remède que Jésus lui-même nous a laissé. Il nous faut répéter comme Jésus: "Seigneur, non comme je veux, mais comme Toi Tu veux !", car nous déclarons ainsi qu'en dépit de notre misère, nous Lui faisons confiance, nous Lui remettons notre esprit. C'est cela que Dieu attend pour nous faire miséricorde - et si nous sommes bien disposés à faire Sa volonté, si nous croyons vraiment que c'est ce qu'il y a de meilleur pour nous, alors nous pouvons prétendre à la sainteté même.
Le tort de Judas, finalement, c'est de s'être pendu: car nous ne pouvons juger nous-mêmes. L'histoire du bon larron en est la preuve: il s'est repenti et s'est retrouvé "aujourd'hui même" dans le paradis. Puissions nous, dès ce monde, entrer dans la Joie du Père qui a veillé chaque jour notre retour ...